Sortie Moto-Neige … pardon Sortie des cols 18-19-20 septembre 2021
C’est sur la terrasse ensoleillée du Tea-Room de La Couronne à Rolle que je retrouve Eric et Sandrine ainsi que Louka pour un long week-end de route à travers les Alpes. Patrick, qui travaille jusqu’à midi nous rejoindra ce soir à l’Hôtel à Innertkirchen.
Comme nous allons nous faire plaisir tout au long de ces trois jours sur des routes de montagne, c’est sans aucune honte que nous prenons l’autoroute jusqu’à Vennes. Nous poursuivons ensuite via Oron Bulle et le barrage de Rossens. Un peu plus loin, nous nous accordons une petite pose café. Installés sur la terrasse, nous sommes assaillis par les mouches. Nous ne nous attardons pas et attaquons ensuite la montée du Gurnigel. On le connait tous bien, mais son ascension nous offre à chaque fois une belle tranche de plaisir.
C’est à son sommet que nous pique-niquons, face à un panorama de rêve. Etonnement, il n’y a que très peu de circulation pour un samedi. Les motards semblent avoir pris un peu trop au sérieux les prévisions alarmistes de la météo. Et pourtant le soleil brille et la température, fraiche au départ, ne cesse de grimper, nécessitant même un arrêt vers Thoune afin d’ôter la polaire. Le Schallenberg s’offrent maintenant à nous avant que nous redécouvrions la fameuse route panoramique, le col du Glaubenbielen. Petite pause désaltérante et à nouveau les mouches nous agressent. Nous auraient t’elles suivies tout au long du parcours ? Peu avant le sommet, un accident s’est produit, impliquant vraisemblablement une Harley et un Trike. Des personnes sont afférées à prodiguer des soins à un jeune garçon. C’est le coeur serré que nous poursuivons notre chemin. Nous passons ensuite le Brunig, qui ressemble maintenant plus à une semi-autoroute qu’à un col des Alpes. En fin de journée nous arrivons à Innertkirchen et retrouvons Patrick, confortablement installé sur la terrasse de l’hôtel. Nous en faisons de même, satisfaits que nous sommes par cette belle journée de route, ensoleillée.
Les mouches sont toujours aussi présentes, mais elles ne nous empêchent pas de profiter d’un apéro bien mérité. Nous nous installons à l’intérieur pour le repas. En effet la température est maintenant bien descendue. Les mouches deviennent insupportables, à tel point que certains hôtes leur font la guerre, équipés de tapettes à mouche.
Tout en dégustant notre repas, débuté par un surprenant potage au sel, nous évoquons bien sûr la météo des prochains jours. Certains d’entre nous semblent plutôt pessimistes, mais pour moi, il ne faut pas s’alarmer, certes le soleil sera vraisemblablement moins de la partie, certes quelques ondées ne sont pas impossibles, mais rien de grave, de toute façon, à cette saison, on ne risque pas de croiser des flocons, pensez-donc.
Et pourtant, c’est l’air morose que nous nous retrouvons pour le petit déjeuner, en découvrant ce que dame météo nous offre pour ce dimanche.
Nous avions programmé une magnifique boucle comprenant au départ le Grimsel, puis la Furka, l’Oberalp, le Lukmanier, la montée de la fabuleuse Tremola avant de finir par le Susten. Malheureusement, il pleut. Devant l’hôtel, nous enfilons vestes et pantalons, sur-gants, sur-bottes, de quoi affronter au mieux les éléments. Sandrine, tarde à nouveau à s’équiper. Pire, elle nous fait comprendre que la pluie, et bien ce n’est pas vraiment son truc. Elle prétexte un équipement mal adapté, une légère migraine, l’habituelle rengaine de la gente féminine à bout d’argument. En ce qui concerne la migraine, je ne vais pas pouvoir la soulager. Par contre, en président toujours dévoué, je sors de ma sacoche un pantalon de pluie, des capotes pour les bottes et des sur-gants. La voici équipée mais toujours pas motivée. Nous grimpons alors le Grimsel sur une route détrempée alors que la température ne cesse de descendre. Au sommet, mon tableau de bord indique 2 degrés. Comme la température, notre tôt de positivité est à la baisse. Après une descente toute de douceur, nous nous arrêtons à Gletsch afin de nous réchauffer avec un bon café. L’avantage de la situation, c’est que les mouches ont disparu.
Dehors, la météo ne s’arrange pas, l’humeur de Sandrine non plus. Nous constatons que les sommets sont maintenant enneigés. Mais nous n’avons rien à craindre, notre chemin passe bien en deçà des cimes. Nous nous élançons derrière Patrick, à l’attaque du col de la Furka. Au passage du célèbre Hôtel du Belvédère, à nouveau les 2 degrés s’affichent ; la pluie a une certaine tendance à s’épaissir. J’apprécie à leur juste valeur les poignées ainsi que la selle chauffantes dont est équipée la Yamaha Tracer 900 GT. Les conditions n’ont pas l’air d’inquiéter Patrick là-bas devant. Imperturbables et confiants, nous le suivons jusqu’à quelques centaines de mètres du sommet du col. Là, à la sortie d’un virage, la route est tout à coup et sans prévenir, entièrement blanche. Le temps de la surprise, nous avançons encore quelques mètres avant que la BMW de tête ne glisse et que moto et pilote ne se retrouvent au sol. Derrière lui, Louka, se retrouve en perdition, sa moto décidant de faire un demitour sans avertir. Avec deux bécanes au sol, nous nous en sortons bien ; aucun blessé n’est à déplorer dans l’aventure.
Il faut maintenant dégager la chaussée. Sandrine, je la comprends, est au bord de la panique, j’ai maintenant des regrets à lui avoir légèrement forcé la main au départ ce matin. Nous remettons sur pieds les machines au sol, ce qui n’est pas une évidence avec des bottes qui glissent dans la neige et quand on connait le poids d’une 1250 RT. Le système de sécurité de cette dernière s’est mis en route et Patrick doit rassurer sa correspondante que tout va bien que personne n’est blessé. Pendant ce temps, une réelle tempête de neige nous assaille.
Après bien des efforts, les motos sont en sécurité en dehors de la chaussée. Une auto s’arrête, le chauffeur est seul à bord et il propose de descendre en plaine trois d’entre nous. Il ne tarde pas à regretter sa proposition lorsqu’il voit 3 motards tout équipés, mais surtout blanc de neige, s’introduire et se poser sur le cuir clair de sa belle Audi A6. C’est trop tard, fallait réfléchir avant. Ils s’en vont alors que je reste seul en haut avec Patrick. Sa BMW ne fonctionne plus après la chute et il essaie d’organiser via BMW Assistance son rapatriement. Pendant ce temps, la tempête fait toujours rage. Nous approchons allègrement les 20 centimètres de poudreuse, mais pire encore, depuis quelques minutes, plus aucun véhicule ne passe. C’est à ce moment qu’Eric m’appelle et me confirme que maintenant la route du col est fermée à la circulation. Le doute m’assaille! Je me vois déjà geler petit à petit et disparaître sous des mètres de neige avant de ne réapparaître au printemps.
Fort de ces bien tristes considérations, je vois subitement s’approcher un chasse-neige accompagné d’un pick-up. Ça y est, nous sommes sauvés, nous ne sommes plus seuls au monde. C’est donc en pick-up que nous redescendons jusqu’à Andermatt. Après avoir pris congé de nos sauveteurs, nous retrouvons le reste de notre équipe à la gare. Il nous faut organiser maintenant notre retour à Innertkirchen où se trouvent encore tous nos bagages.
Nous allons passer par Schwyz, Lucerne, Meiringen, changer cinq fois de train avant de retrouver notre hôtel quatre heures plus tard. Super la sortie des cols ! Le lendemain, après une soirée bien arrosée, nous nous retrouvons pour le petit déjeuner. Les nouvelles ne sont pas bonnes. Bien qu’il ne pleuve plus, les cols sont toujours fermés. Nous tentons d’organiser notre retour en train et étudions un moyen de récupérer nos montures avant la fin de la semaine, quand, tout à coup, on nous annonce que le Grimsel est à nouveau praticable. Ni une ni deux nous fonçons prendre un billet de bus pour rejoindre dans un premier temps Gletch. Patrick, pour sa part, rentre directement en train, sa moto sera rapatriée par le TCS.
Une fois dans le bus, nous apprenons que la route de la Furka est à nouveau ouverte. Arrivé à Gletch, force est de constater qu’aucune voiture ne passe. Nous ne sommes pas encore arrivés à nos motos et le temps menace à nouveau. Eric aperçoit un groupe de chasseurs, c’est aujourd’hui l’ouverture de la chasse ; des valaisans de la plaine venus en repérage. Ils acceptent de nous monter à bord de leurs Jeep jusqu’à nos montures. Nous sommes rapidement sur place, la route est propre, dégagée. Après avoir vivement remerciés nos chasseurs, il nous faut redescendre rapidement en plaine car les premiers flocons tombent à nouveau. Les serrures des sacoches de la moto d’Eric sont gelées. Qu’à cela ne tienne, c’est avec des sacs en bandoulière que nous redescendons de la montagne.
Ça y est, nous avons récupéré nos motos, nous sommes entiers, Sandrine retrouve son légendaire sourire. Il nous reste à regagner la maison, sous une pluie à nouveau battante et en subissant bien des bouchons sur l’autoroute.
Super la sortie des cols !
Grégoire Villard, septembre 2021